De l'importance du cadre mental dans la montée des extrêmes

Au XIe siècle, le cadre mental des habitants d’Europe était structuré par les Écritures. La Bible, ainsi que les textes et les discours de l’Église, fournissaient à la fois un cadre moral, une explication du monde, et une lecture des phénomènes naturels et sociaux. Quand les récoltes étaient bonnes, cela signifiait que les fidèles avaient vécu pieusement, commis peu de péchés. Mais lorsque la peste frappait, que les catastrophes naturelles se multipliaient ou que le bétail mourait, c’est dans ces mêmes textes que l’on allait chercher une explication : le péché, la colère divine, les hérétiques ou les forces du mal.

Il fallait alors expier, partir en croisade, chasser les impies. Et parfois, brûler des sorcières ou accuser les Juifs d’avoir empoisonné les puits. Le cadre intellectuel nourri par la Bible structurait tout l’imaginaire collectif. Les gens faisaient avec les outils qu’ils avaient, et ces outils façonnaient leur perception de la réalité, avec les conséquences qu’on connaît.

Aujourd’hui, une population acculturée au néolibéralisme et abreuvée de culture nord-américaine ne peut plus penser hors du cadre imposé par cette idéologie dominante. Comme les populations médiévales, elles doivent faire avec ce qu’elles ont. Et lorsque quelque chose dysfonctionne dans la société, on n’interroge pas le système lui-même : on désigne des coupables. Les étrangers, les marginaux, les "déviants".

C’est sans doute cela qui alimente la montée de l’intolérance et, avec elle, le succès croissant de l’extrême droite.