La valorisation de la bourgeoisie par la figure du transclasse
La notion de “transclasse” fonctionne en réalité comme un outil idéologique servant à valoriser toujours la classe bourgeoise. En effet, celui qui s’élève par l’éducation ou par son travail est présenté comme accédant au statut bourgeois, comme si ce dernier était naturellement supérieur à celui de prolétaire.
Or, nombre de prolétaires qui s’émancipent par l’instruction ou la réussite professionnelle demeurent des prolétaires. Ils deviennent simplement des prolétaires éduqués, prospères, des prolétaires autonomes. Ils ne renient en rien leur origine sociale, mais au contraire, portent haut les valeurs de leur classe. Les faire entrer dans la catégorie des “transclasses” revient à nier cette fidélité, et à insinuer que l’idéal est ailleurs du côté bourgeois. Cela suppose encore que les valeurs de la bourgeoisie seraient, par essence, plus désirables.
Mais pour celui qui s’émancipe réellement, s’intégrer à la bourgeoisie peut apparaître non comme une réussite, mais comme une forme d’aliénation. C’est justement parce que le prolétaire s’élève qu’il incarne la force d’émancipation propre à sa classe. Cette force n’est pas individuelle, elle est porteuse d’idéaux universels, d’une exigence morale supérieure : l’égalité, la solidarité, la justice.
Ainsi, le passage du prolétariat à la bourgeoisie ne saurait être considéré comme une émancipation. Au mieux, il s’agit d’un reniement, d’un abandon des valeurs qui font du prolétariat une classe d’avant-garde.